Résumé
Au travers de l'examen détaillé des opinions des Français en matière de cadre de vie et d'environnement, on relève un début de véritable prise de conscience de la gravité de ces problèmes. C'est probablement l'amélioration et la diffusion des connaissances dans le domaine qui l'expliquent. Cette prise de conscience se traduit par des positions tranchées au sein de la population : d'un côté, un sentiment de satisfaction relatif au cadre de vie et de l'autre, une vive inquiétude quant à l'avenir de la planète. Que ce soit sur les actions prioritaires à mener pour préserver l'environnement, sur celles initiées par la collectivité, ou encore sur celles qu'eux-mêmes, individuellement, ils se disent prêts à engager, les Français émettent des opinions qui ne manquent donc pas de révéler un vrai souci envers l'environnement. Les enseignements apportés par l'étude peuvent se résumer en cinq points :
1 - La satisfaction générale sur leur cadre de vie est toujours partagée par une grande majorité des Français (84%). Cependant, certaines divergences d'opinion, essentiellement liées aux caractéristiques du logement de résidence (type et statut d'occupation) et au lieu d'habitation, apparaissent : le manque de confort et la résidence dans une grosse agglomération sont facteurs d'insatisfaction. L'étude approfondie de la minorité des "très insatisfaits de leur cadre de vie " révèle qu'ils se trouvent dans une situation économique et sociale plus précaire que la moyenne. Défavorisés sur le plan du logement, ils ont également un niveau de vie moins élevé que le reste de la population. On compte parmi eux une grande proportion de chômeurs et d'ouvriers.
2 - L'optimisme majoritaire relatif au strict cadre de vie ne doit cependant pas cacher des craintes plus sérieuses pour l'environnement au sens large. Si la question de la dégradation de l'environnement se classe dans l'esprit des Français derrière les problèmes aigus de société, tels que le chômage, la drogue, les maladies graves, elle n'en est pas moins un véritable sujet de préoccupation. La quasi-totalité des enquêtés (91 %) se déclarent vraiment soucieux pour l'environnement. Les diverses inquiétudes qui y sont relatives font l'objet d'une hiérarchie : la pollution de l'eau courante et les problèmes de santé liés à la dégradation de l'environnement sont les phénomènes considérés comme les plus préoccupants par les Français tandis que le réchauffement de la planète et le développement de l'énergie nucléaire le sont moins. Chaque catégorie socio-démographique a ses propres inquiétudes : les femmes mentionnent davantage les problèmes de santé ; la pollution de l'eau inquiète les plus de 65 ans ; les individus les plus favorables aux progrès scientifiques sont, eux, plus préoccupés par le réchauffement de la planète.
3 - Les priorités énoncées en vue de faire face aux problèmes d'environnement sont d'une manière générale assez cohérentes avec les inquiétudes déclarées. Quand on analyse les attentes des Français sur les actions à mener pour préserver l'environnement, deux axes principaux de lutte se dégagent. D'un côté, il faut combattre les pollutions industrielles (gérer l'élimination des déchets, prévenir les risques de l'industrie nucléaire) et de l'autre, s'attacher à réduire la pollution de l'eau et celle de l'air, de l'atmosphère. Les actions qui renvoient à la notion de protection de la nature (sauvegarde des plantes et des animaux sauvages et protection des paysages) ont une importance moindre, dans l'esprit des Français, que celles qui s'y opposent et qui font référence à la notion de pollution (et ainsi de dégradation de la nature). On relève aussi que les avancées technologiques (le développement de nouvelles technologies de production et la prévention face aux risques du nucléaire) sont perçues de deux manières opposées : certains y voient un risque pour l'environnement et d'autres un moyen d'action pour le préserver.
4 - Le souci de l'environnement se traduit dans l'engagement des Français pour des actions individuelles concrètes. Plusieurs niveaux d'actions sont recensés. Ils permettent d'apprécier les limites de cet engagement. En tout état de cause, c'est la liberté d'action qui prime, les actions obligatoires ne recueillant que peu de suffrages. Ainsi, l'utilisation de poubelles séparées pour les différents types de déchets est très largement acceptée (84%). Encore peut-on se demander si les intentions affichées là reflètent ou refléteront les pratiques quotidiennes. L'effort financier, consistant à acheter plus cher certains produits réputés non polluants, mérite attention : 63 % des enquêtés se déclarent prêts à acheter plus cher des produits d'agriculture et d'élevage plus naturels et 54% des produits industriels reconnus comme préservant l'environnement. Les personnes réticentes à ce type d'actions ont un niveau de vie moins élevé que la moyenne et quelques difficultés financières. L'accueil est plus réservé quand il s'agit d'actions régulières et/ou obligatoires. Ainsi, 60% des Français refusent de renoncer à leur voiture pour les petits déplacements quotidiens. 70% s'élèvent contre l'instauration d'une taxe spéciale pour l'environnement. Même s'il est étonnant de constater que 30% des Français sont malgré tout favorables à cette idée, il reste qu'il existe bien un certain décalage entre l'inquiétude affichée face aux problèmes d'environnement et le réel engagement des particuliers.
5 - Enfin, pour les Français, pouvoirs publics et entreprises sont et doivent continuer à être impliqués dans la lutte contre la dégradation de l'environnement. C'est autant à l'Etat, par le biais de certaines mesures incitatives et propositions concrètes, qu'aux entreprises, grâce aux nouvelles technologies, de faire des efforts en matière d'environnement. Pour le moment, les mesures de l'un et des autres sont assez mal perçues par l'opinion publique. Non seulement une nette majorité de Français (68%) estiment que les pouvoirs publics ne s'occupent pas assez ou pas du tout des problèmes d'environnement, mais 27% pensent aussi "qu'ils s'en occupent, mais que ce n'est pas efficace". Les efforts fournis par les entreprises sont, de même, jugés insuffisants par nos concitoyens (plus de trois personnes sur quatre estiment que les efforts des entreprises en matière de lutte contre les pollutions sont insuffisants ou vraiment insuffisants). Par ailleurs, les quelques tentatives des entreprises pour préserver l'environnement laissent les Français dubitatifs : un sur deux déclare ne tenir aucun compte des caractéristiques écologiques de certains produits mises en avant dans leur publicité par certains industriels. La principale raison avancée réside dans le doute qu'ils ont sur l'exactitude des qualités réelles de ces produits.
Un véritable souci à l'égard de l'environnement anime donc une bonne partie de la population. Les Français semblent prêts à adopter certains changements dans leurs comportements quotidiens vis-à vis de l’environnement. Cependant, ils souhaitent avoir le libre choix de le faire. Ainsi, l’engagement individuel se trouve fortement amoindri lorsque les contraintes se font plus grandes. En particulier, le caractère obligatoire de certains types d'actions rebute un bon nombre de personnes. Mais même si leur propre engagement est limité, cela n'empêche pas les Français de réclamer une plus grande intervention publique ou privée, par le biais de l'Etat comme des entreprises.