Résumé
La question de l’invisibilité sociale de « groupes de population mal couverts par la statistique publique, peu visibles pour les pouvoirs publics et peu ou mal appréhendés par les politiques sociales » n’est pas nouvelle. Elle est toutefois de plus en plus présente dans le débat public, tant « l’impression d’abandon exaspère aujourd’hui de nombreux Français. Ils se trouvent oubliés, incompris, pas écoutés. Le pays, en un mot, ne se sent pas représenté ». Notion aux contours encore instables, parfois instrumentalisée à des fins électorales ou politiques, elle se nourrit cependant peu à peu de travaux qui cherchent à produire une meilleure compréhension du monde social et de sa complexité, en identifiant le profil des populations qui, parce qu’elles sont « hors normes », sont confrontées à des difficultés méconnues ou mal appréhendées.
Cette recherche d’une meilleure connaissance semble en effet incontournable pour un déploiement d’actions publiques appropriées. Résoudre des difficultés dont on ignore précisément les cibles, les causes ou les conséquences, voire leur nature même, s’avère en effet délicat. Dans l’optique d’approfondir la compréhension du phénomène dans toute sa diversité, des publics comme des difficultés auxquels il renvoie, l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale (ONPES) a confié au Crédoc la réalisation d’une étude quantitative caractérisée par une approche méthodologique inductive. En effet, loin de cibler des catégories de population préconstruites, identifiées comme particulièrement exposées à l’invisibilité sociale, l’enquête porte sur un échantillon représentatif de la population française. Les questions sur la nature de l’invisibilité sociale ont été formulées de manière ouverte : les catégories d’analyse ont donc été créées à partir des discours produits, plutôt que l’inverse.
Néanmoins, il faut souligner que l’enquête n’intègre pas les publics en situation de grande exclusion (personnes sans domicile, ou qui ont des grandes difficultés d’expression en français), et minore probablement certaines populations réticentes à répondre aux enquêtes (en situation irrégulière sur le territoire par exemple).