Résumé
Le CREDOC mène depuis 1986 une évaluation de divers segments de politique sociale à la demande du Commissariat Général du Plan et de plusieurs services du Ministère du Travail, de l'Emploi et de la Formation professionnelle. Le champ de l'observation est constitué de quatre zones d'emploi : celles de Lannion, de Roanne, de Saint-Nazaire et de la Vallée de la Meuse dans les Ardennes. Ce sont des bassins aux caractéristiques différentes mais tous quatre touchés par des restructurations industrielles. En retenant des zones de taille moyenne dont les populations ont été, un peu plus qu'en moyenne nationale, confrontées aux difficultés sociales engendrées par le ralentissement de la croissance industrielle et la montée du chômage, il s'agissait pour nous d'obtenir une bonne visibilité de la stratégie des acteurs locaux chargés de trouver des solutions spécifiques aux problèmes de leur bassins en s'appuyant sur les mesures nationales disponibles et, en particulier, sur les dispositifs récents. Toutefois, nous avons pris soin de ne pas retenir des zones dans des situations exceptionnelles, aussi bien pour ce qui concerne l'acuité de la crise de l'emploi que pour les moyens financiers et humains qui leur ont été alloués par l'Etat sur dotations spécifiques au cours des dernières années.
Les deux rapports publiés en 1987 ont tenté de mettre en évidence l'intérêt mais aussi les limites actuelles des réponses locales à la crise en matière de formation initiale et d'aide à l'emploi des jeunes, d'expliquer les causes de ces limites et de dégager les formes d'actions les mieux à même de les dépasser. Mais nous n'avons pas cherché alors à analyser en détail la situation respective des garçons et des filles face à ces dispositifs. Or on retrouve dans nos quatre zones un paradoxe évoqué dans des études récentes de l'INSEE : alors que les jeunes femmes disposent aujourd'hui de deux atouts majeurs sur le marché du travail -augmentation très rapide de leur niveau moyen de formation initiale et excellente implantation dans la plupart des secteurs d'activité qui ont bénéficié de créations nettes d'emploi récemment-, le chômage féminin a continué à croître au cours des deux dernières années contrairement au chômage masculin qui régresse.
1 - "La rénovation des enseignements technologiques et professionnels" mai 1987 et "La crise de l'emploi dans des zones en restructuration industrielle : impact des politiques de formation et d'aide à l’insertion professionnelle des jeunes" décembre 1987 par E. PASCAUD et B. SIMONIN - Collection des rapports du CREDOC.
A l'origine d'une telle évolution on ne trouve pas, bien sûr, une cause unique mais nous avons tenté dans la suite de ce texte de souligner quelques facteurs explicatifs qui nous ont semblé particulièrement importants -inadaptation spécifique de l'enseignement professionnel féminin, faiblesse de l'impact des mesures d'aide à l'emploi, modification des relations formation-emploi- en utilisant à la fois nos analyses de terrain et les données nationales les plus récentes.
Ce rapport comporte quatre chapitres.
Le premier retrace, à partir de l'exemple de nos quatre zones d'observation, la progression spectaculaire du niveau de formation initiale des jeunes filles et fait le point sur l'intensité des difficultés d'insertion professionnelle selon le sexe et la filière scolaire.
Le second chapitre est consacré à l'analyse des faiblesses de l'enseignement professionnel féminin qui, à notre sens, est moins bien placé que l'enseignement professionnel masculin pour profiter des nombreuses réformes introduites depuis quelques années par le Ministère de l'Education nationale.
Le troisième chapitre vise à mettre en évidence les modifications récentes des relations entre le niveau de formation des jeunes femmes et les catégories d'emploi auxquelles elles peuvent prétendre. Il en ressort en particulier que les employés administratifs d'entreprise se rapprochent de plus en plus de la sphère des professions intermédiaires, d'où la nécessité pour l'enseignement professionnel féminin d'opérer une mutation très profonde dont on n'a pas encore pris complètement la mesure.
Enfin, le dernier chapitre tente d'appréhender l'impact des mesures en faveur de l'emploi des jeunes et, surtout, le rôle des formules les plus prometteuses pour l'insertion professionnelle, à savoir les contrats d'adaptation et de qualification. Il s'agira d'examiner si les jeunes femmes qui en ont bénéficié en 1986 et 1987 sont bien celles qui semblaient en avoir le plus besoin où s'il y a eu quelques dérives dans les caractéristiques des publics concernés par rapport à l'esprit des textes initiaux.