Les dommages collatéraux de la crise du logement sur les conditions de vie de la population Collateral damages of the housing crisis to the living conditions of the population

M. Babès - R. Bigot - S. Hoibian

Cahier de recherche N°C281

Résumé

Les quinze dernières années ont été marquées par une hausse des prix de l'immobilier largement déconnectée de l'évolution des revenus des ménages français. Entre 1996 et 2011, les prix des logements anciens ont ainsi été multipliés par 2,5 et les loyers par 1,6, tandis que le revenu nominal disponible par personne était multiplié par 1,5. En s'appuyant sur l'enquête "Conditions de vie et Aspirations "du Crédoc, ce travail montre que la hausse des dépenses de logement retentit sur les conditions de vie de la population. Tout d'abord, l'augmentation des prix du logement a opéré une modification en profondeur du profil des habitants des différents parcs d'habitat. Le parc locatif accueille de plus en plus des ménages jeunes, célibataires, ayant des revenus modestes. Deuxième conséquence : les dépenses de logement empiètent progressivement sur les autres postes de la consommation et en particulier sur l'alimentation, les transports, les loisirs et l'équipement du foyer. Au-delà, de l'impact direct sur le pouvoir d'achat des ménages, l'appréciation des biens immobiliers induit un "effet de richesse ": se sentant plus riches (surtout dans les phases de hausse des prix), et plus en sécurité par rapport à l'avenir, les accédants à la propriété sont, en moyenne, mieux dotés en biens d'équipement. Mais les difficultés financières rencontrées par nos concitoyens en matière de logement se répercutent dans des dimensions qui semblent, à première vue, moins évidentes. Elles semblent peu à peu affecter également le moral des ménages, leur état de santé, ou leur capacité à maintenir le lien social. Au total, l'appréciation de la valeur des logements ces quinze dernières années a eu pour conséquence de creuser le fossé entre, d'un côté, les propriétaires qui se sentent de plus en plus à l'abri, et les locataires qui se sentent de plus en plus vulnérables et déclassés socialement.Ces résultats invitent à introduire plus souvent le logement — et plus généralement les éléments de patrimoine — comme variables explicatives des disparités de conditions de vie et d'opinion. Ils contribuent également l'opinion à revisiter l'objectif d'accession à la propriété pour tous, encouragé de longue date par les pouvoirs publics, pour lui préférer une société où tout le monde puisse disposer d'un logement confortable à un coût raisonnable.

Abstract :

Increasing housing prices were largely disconnected from the evolution of household incomes over the last fifteen years in France. Between 1996 and 2011, housing prices (in the ancient) have been multiplied by 2.5 and rents by 1.6 while the available per capita income was only multiplied by 1.5. Using data from the CRÉDOC survey "Living Conditions and Aspirations", this research paper shows that increasing housing expenditures have a direct impact on the living conditions of the population.First of all, increasing housing prices induced a structural change of the profile of the people occupying the different kinds of accommodation. Today, young people, singlehouseholds,or households with a low income level have more and more to rent an accommodation than to buy it. Secondly, housing expenditures impact more strongly other part of consumption than the years before, especially food-expenditures, transport,leisure time expenditures and household equipment. As a matter of fact, housing expenditures influence directly the purchasing power of a household. Furthermore,disposing of real estate property may induce a "wealth effect": people think they are wealthy especially when prices are high and they feel more secure about the future.Finally, the study showed that home-buyers are living in better equipped households than on average.In any case, housing expenditures that lead to financial difficulties may have also an impact on other domains of our fellow citizen's everyday life. Repercussions seem more and more noticeable when speaking of the "household confidence", their state of health or their ability to support a social network. The increasing of housing prices over the last fifteen years was enlarging the gap between home-owners who feel more and more secure and private renters who feel more and more vulnerable and socially declassed.The results of this study show that housing and more generally speaking parameters of property are appropriate statistical data which allow explanations about disparities in living conditions and opinions. All in all, public opinion might also be more reluctant than in former years regarding the public policies that pretend to make a future home-owner out of everybody and would prefer that everybody gets access to convenient housing at a reasonable price.


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